Archipop, la cinémathèque populaire

Par Christian Defrance, 15/05/2020.

Publié le 15 mai 2020

Spécialisée dans la collecte et le partage de vidéos réalisées par des amateurs, l’association Archipop propose aux cinéphiles de découvrir un patrimoine méconnu qui permet de revivre des pans complets de l'histoire de notre région.

Archipop
Pour tromper l’ennui et créer de nouveaux liens avec sa famille ou ses voisins pendant le confinement, l’association a mis à disposition des internautes sur son site web des films à regarder chez soi ou à projeter sur une façade extérieure.

Archipop pour archives populaires. Cette association, créée en 2003 par l’Atelier 142, collecte (depuis 2006), numérise, archive, conserve, valorise des films amateurs. Née à Beauvais dans l’Oise, Archipop est résolument régionale depuis 2015, offrant par le biais des films amateurs, qu’ils soient films de famille (vacances, baptêmes et communions), films de fiction ou parfois documentaires, un "regard particulier" sur les activités, les événements, la vie quotidienne dans les Hauts-de- France durant les premières décennies du XXième siècle. "Archipop représente à ce jour 517 collections d’archives cinématographiques collectées, 534 cinéastes, 7 712 supports traités" explique le directeur François Raboteau. Les supports sont en  grande  majorité argentiques, de 1923 à aujourd’hui. Si 1922 vit l’invention du cinéma amateur avec l’apparition du film 9,5 mm avec perforation centrale lancé par Charles Pathé ; la caméra adaptée à ce format n’arriva qu’en 1923. "C’était le cinéma chez soi, en trois minutes" souligne Charlène Auvinet, chargée de projet. Le film 16 mm a suivi peu de temps après et dès 1932 avec le 8 mm, les films amateurs prenaient des couleurs. Lancé en 1965 par Kodak, le Super 8 a donné lieu à une "vraie démocratisation" du cinéma amateur. "Et une vraie explosion qui nécessite une grande vigilance de notre part lors de la collecte" ajoute Charlène Auvinet. La fin des années 70 a vu le règne des supports magnétiques, le VHS "compliqué à exploiter car il s’altère beaucoup plus vite".

 

Archipop et le Pas-de-Calais

Depuis l’été 2018, l’association mène un partenariat avec la Communauté d’Agglomération des 2 Baies en Montreuillois. La série « une voix, un patrimoine » compte déjà 5 épisodes qui racontent le patrimoine local. L’exposition « Premiers regards » s’enrichit de nouveaux photogrammes et la création d’un catalogue à destination des collectivités. À Nœux-les-Mines, le projet « Mémoires sociales » a été amorcé en 2018 avec l’association Mémoires du travail sur le Quartier Terre Noeve dans le cadre de la politique de la ville. C’est un projet de collecte et de valorisation d’archives cinématographiques, iconographiques et de témoignages autour de l’histoire de ce quartier.

 

Filmeurs amateurs

La collecte est évidemment le nerf d’Archipop, une collecte de plus en plus ciblée tenant compte de la qualité du film, de son contenu "et il faut parfois beaucoup de pédagogie pour expliquer que le film d’un mariage nous intéresse". Basée sur des réseaux tissés dans les territoires, issue largement de clubs (les Caméra clubs), de dons de particuliers, cette collecte permet de dessiner des profils types de filmeurs : beaucoup de photographes, d’enseignants et de curés, beaucoup d’électriciens aussi. "On ne numérise pas tout, on visionne tout et on sélectionne". La numérisation, un traitement particulier, s’effectue "en externe" par des spécialistes. Après la collecte, Archipop effectue "un gros travail de recontextualisation", souvent avec des historiens locaux, pour faire parler la pellicule : qui voit-on ? C’est où ? Quand ? Car la valorisation est le cœur d’Archipop. L’association mène des actions - expositions, projections, ateliers scolaires, etc. - en partenariat avec des collectivités, des structures culturelles.

Avec plus de 1 300 heures de films - et en moyenne chaque mois 10 heures d’archives nouvelles -, Archipop est un bel outil pour explorer l’histoire industrielle, agricole, les traditions locales des Hauts-de-France. Pour mesurer aussi l’évolution de la région.

 

De la caméra au web !

Avec le cinéma amateur, on ne voit pas que par le petit bout de la lorgnette, « nos images sont avant tout une matière vivante, riche, diverse, surprenante et souvent singulière » dit Corinne Zongo-Wable, présidente d’Archipop (environ deux cents adhérents). Une matière vivante que l’association souhaite mettre en ligne à la disposition du grand public. "Archives en ligne est la page la plus consultée de notre site web ( www.archipop.org/les-films/ ) » assure le directeur. L’internaute peut ainsi choisir un thème, des activités balnéaires à la vie rurale en passant par les fêtes, la famille… Pierre Louf de Wissant, "un des plus beaux cinéastes amateurs" selon Charlène Auvinet, a ainsi réalisé un véritable documentaire (16 mm, couleur) sur la pêche du hareng dans les années cinquante. Durant l’été 1937, Pierre Maillard a filmé des vacances à Merlimont. Paulette Lefebvre a filmé la visite du général de Gaulle à Montreuil-sur-Mer en 1959. Arthur Beaucourt a filmé un "passage du Code de la route en voiture à pédales" en 1957 à Marquion.

Autant de "p’tits films qui n’en veulent" (dirait le Deschiens François Morel) avec leurs lieux détruits, leurs métiers disparus, leurs inconnus immortalisés, des films archi-vrais pour rafraîchir la mémoire populaire des Hauts-de-France.

 

Contact :

Archipop, 8 rue du Musée à Beauvais 03 44 22 60 55

www.archipop.org contact@archipop.org