Les archéologues de la Maison de l'archéologie du Pas-de-Calais viennent de terminer un chantier de fouilles préventives sur la commune de Saint-Martin-les-Tatinghem qui a révélé des vestiges allant de l'Âge du bronze à l'Antiquité, notamment 13 tombes du Haut et Bas-Empire romain, quelques squelettes et du mobilier, comme de la verrerie. 

Quand, en 2021, la Communauté d'agglomération du Pays de Saint-Omer déclarait d’intérêt communautaire l’extension de la zone d’activités du Fond-Squin, elle ne s’attendait pas à ce que le site en question recèle de telles traces du passé. 

 

2000 ans d’histoire 

Dans l’une des fosses, des traces de bois témoignent indéniablement d’une tombe. Indices renforcés par l’empreinte d’un corps et de chaussures posées à côté mais également une carafe et deux gobelets en verre soufflé, intacts. Pour Vincent Merkenbreack, archéologue départemental, spécialiste de l’Antiquité romaine, « retrouver ce type de mobilier dans un si bel état, c’est très rare. Cette verrerie date a priori du IVe siècle. Elle a presque 2000 ans et on dirait de l’art déco. » 

Cette fouille fait suite à un diagnostic archéologique réalisé en 2021 sous la conduite de Jérôme Maniez qui avait révélé une occupation datant de l’âge du Bronze. Rien de très visuel pour le novice, mais intéressant en terme d’occupation des sols, notamment dans l’Audomarois où très peu de sites de cette époque ont été découverts. L’État a donc prescrit des recherches approfondies sur trois zones concernées par l’agrandissement de la zone d’activités. C’est ainsi que depuis juin dernier, une équipe de la Maison départementale de l’archéologie, sous l’autorité d’Emmanuelle Leroy Langelin, spécialiste de l’Âge du Bronze et de Vincent Merkenbreack, est sur place, décapant et creusant à la pelle mécanique les endroits stratégiques, grattant au scalpel et époussetant au pinceau la moindre trace du passé. 

Une découverte exceptionnelle 

« Au moment du décapage, nous avons sorti des vestiges funéraires du Haut-Empire, notamment des urnes funéraires en verre ce qui n’est pas banal pour la région », précise Vincent Merkenbreack. Mais la découverte qualifiée d’exceptionnelle est venue de la dernière zone : « Nous avons mis au jour un petit cimetière de 13 tombes de grand gabarit, probablement de la première moitié du IVe siècle. Trois de ces tombes sont entourées d’un fossé circulaire. Dans les Hauts-de-France on n’en a trouvé que sur deux sites, à Hénin-Beaumont et à Dourges », souligne le spécialiste de l’Antiquité romaine. 

De la surprise à l’émotion 

Dans l’une des tombes, Justine s’attache à dégager une cruche en céramique. Dans une autre, Alexis s’occupe de la verrerie exceptionnellement bien conservée, mais aussi d’un plat en bronze plus dégradé qu’il tente de consolider...

Dans la tombe à côté, Mikel gratte un crâne en espérant pouvoir prélever l’ensemble du squelette. Plus loin, Laurent voit apparaître deux orbites creuses et quelques dents. Dans la fosse qu’il ausculte avec minutie, il en est certain: « Deux corps ont été inhumés. » Avec une précision chirurgicale et une certaine forme de respect, les deux archéologues nettoient chaque morceau d’os 

Plus loin, Céline est toujours en train de creuser. Manque de chance, elle n’a pas encore vu émerger le moindre vestige. Mais elle ne désespère pas… Si la tombe ne cachait aucun dépôt, le défunt était bien présent et le crâne a pu être prélevé. 

Un article à retrouver dans son intégralité en page 21 de L'Echo62  du mois de septembre

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Photos Jérôme Pouille/CD62

Notre département, notre patrimoine

Aujourd’hui, le chantier de fouille est terminé. Les engins vont pouvoir entrer en action pour aménager, comme prévu, la future zone d’activités. « Nous ne sommes pas un frein à l’aménagement du territoire. Au contraire, nous venons en soutien auprès des élus en intervenant en amont, pour fouiller, comme le prévoit la loi, ce qui est menacé d’être détruit. La vie économique va suivre son cours », précise Vincent Merkenbreack.

Quant aux archéologues, c’est maintenant à Dainville, en laboratoire, qu’ils vont poursuivre leurs travaux. Chaque élément prélevé, chaque relevé, chaque photographie se retrouvera entre les mains des différents spécialistes de la Maison départementale de l’archéologie. « L’un des objectifs d’une opération archéologique, c’est de restituer au grand public ce patrimoine qui est le leur, le nôtre. Il y aura forcément une valorisation à la Maison départementale de l’archéologie à Dainville et certainement des colloques scientifiques… On peut aussi envisager des conférences avec des partenaires comme la Capso, la Maison du patrimoine et le musée Sandelin à Saint-Omer, la Maison de l’archéologie à Thérouanne, les Antiquaires de la Morinie… », espère Vincent Merkenbreack. 

En attendant, les archéologues ont deux ans pour fournir un rapport détaillé qui permettra d’en savoir plus sur l’histoire de l’Audomarois en particulier et du Pas-de-Calais en général. 

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