Un nouveau bâtiment va bientôt accueillir les Archives départementales du Pas-de-Calais à Dainville. Trois ans de travaux pour accueillir trente kilomètres linéaires de documents, abrités depuis 1974 au Centre Mahaut-d’Artois entre autre. Ce déménagement d'ampleur, débuté le 1er septembre 2025, va durer plusieurs mois.
Au printemps 2026, le nouveau bâtiment va regrouper sur un seul site l’ensemble des fonds et des activités des Archives départementales. Jusqu’à aujourd’hui, le service des Archives départementales occupait deux sites distincts : les archives contemporaines et journaux au Centre Georges-Besnier, place de la Préfecture à Arras et les archives anciennes et modernes au Centre Mahaut-d’Artois à Dainville. Arrivés à saturation, ces sites ne répondaient plus aux normes actuelles de conservation des archives ni aux normes actuelles d’accessibilité à tous. En 2019, le Département du Pas-de-Calais a décidé de construire un nouveau centre de stockage.
Les Archives du Pas-de-Calais : le club des "5 C" *
Un article à retrouver en intégralité en page 18 de L'Echo62 de novembre
Appelé à ouvrir dans le courant de l’année 2026, le nouveau centre des Archives départementales du Pas-de-Calais est conçu pour accueillir soixante kilomètres linéaires de rayonnages mobiles destinés à « abriter » des documents.
Si ce nombre, 60, peut impressionner, il vient au contraire rassurer Lionel Gallois, le directeur des Archives du Pas-de-Calais, amené à constater que l’ancien bâtiment, la « tour » de Dainville, était largement arrivé à saturation. Formé à l’École nationale des chartes - Lionel Gallois est arrivé à Dainville en 2009. « Nous recevions 500 à 600 mètres linéaires de documents chaque année », dit-il pour revenir sur cette saturation qui, dès 2018, a incité le conseil départemental à projeter la construction d’un nouveau bâtiment,.
Une question d’avenir
Mais pourquoi garde-t-on des archives ? « Les archives sont l’Histoire du Pas-de-Calais, du Moyen Âge à aujourd’hui », décrit le directeur. Si l’on se réfère au Code du patrimoine, les archives sont «l’ensemble des documents, y compris les données, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, produits ou reçus par toute personne physique ou morale et par tout service ou organisme public ou privé dans l’exercice de leur activité ». Documents produits par les notaires, par les communes, par les établissements publics, etc., « nous sommes un rouage indispensable pour prouver des droits, témoigner de certaines activités », assure Lionel Gallois qui approuve sans aucun doute la phrase du philosophe Jacques Derrida, citée par l’archiviste Marie-Anne Chabin: « La question de l’archive n’est pas une question du passé. C’est une question d’avenir, la question de l’avenir même, la question d’une réponse, d’une promesse, d’une responsabilité pour demain ».
Une responsabilité pour demain qui s’appuie sur des missions que les archivistes appellent « les 5 C ».
C pour collecter d’abord.
Il s’agit de faire entrer les archives par versement, achat, don ou dépôt ; d’évaluer l’intérêt historique et scientifique ; de sélectionner les documents à conserver. C pour contrôler aussi : Lionel Gallois lui préférant d’ailleurs le verbe conseiller. Les Archives départementales vérifient dans les administrations publiques la bonne tenue et le rangement des dossiers couramment utilisés ; elles délivrent les autorisations de les détruire. Elles peuvent apporter des conseils aux associations, aux particuliers.
C pour conserver.
« La conservation est notre rôle de base ». Il faut protéger, restaurer, ranger dans des boîtes normalisées en carton au pH neutre. Et tous les documents doivent finalement se retrouver dans un bâtiment répondant à des enjeux de stabilité de température, d’hygrométrie. Le nouveau centre de la rue du 19-Mars-1962 apportera toutes les garanties nécessaires. Le directeur n’oublie pas d’évoquer le microfilmage, la numérisation des documents les plus fragiles ou les plus consultés.
C pour classer.
Les documents sont mis en ordre à l’intérieur de dossiers, lesquels se retrouvent à l’intérieur d’un fonds. La rédaction d’un inventaire intervient avant le rangement. « Conserver, inventorier, c’est un travail à la fois physique et intellectuel », souligne Lionel Gallois.
Le cinquième « C » est celui de communiquer.
Une salle de lecture « adaptée » est accessible gratuitement et Lionel Gallois de marteler que « ce loisir culturel est ouvert à tous » **, que des agents sont là pour aider, pour guider « dans les recherches sur sa famille, sa maison, son village ». Aider, sur place ou par correspondance ; depuis 2020 en effet, les Archives départementales ont constaté une forte augmentation des demandes de renseignements par courrier, électronique généralement. Enfin, la mise en ligne sur le site Internet des Archives du Pas-de-Calais (créé en 2007) des actes d’état-civil, des recensements, des registres matricules, entre autres, a donné un grand retentissement au C de communiquer. Et quand on lui demande d’où sont les usagers des archives, il répond : « 50 % du Pas-de-Calais, 50 % de l’extérieur». Et qui dit extérieur, dit monde entier !
Mettre en valeur
Communication rime avec valorisation et les Archives veillent à « présenter, mettre en valeur l’Histoire du Pas-de-Calais » par le biais d’expositions, d’ateliers pédagogiques (pour les scolaires notamment). « Les archives, il faut que ça bouge, que ça sorte », renchérit Lionel Gallois toujours pour se défaire de l’image « vieux papiers ».
En attendant de retrouver complètement leurs « 5 C », les trente-cinq agents des Archives départementales du Pas-de-Calais sont plongés dans un « grand D », D comme déménagement...
* Allusion au Club des cinq, la série de romans d’aventures écrite par Enid Blyton.
** Depuis la loi fondatrice du 7 messidor an II (25 juin 1794) déclarant que « tout citoyen » a accès aux archives (article 37), le public est accueilli dans les services d’archives.
Photos J.Pouille/CD62