Généalogistes, historiens locaux, enseignants, étudiants, ils sont nombreux à «avoir hâte de découvrir le nouveau bâtiment» des Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 rue du 19-Mars-1962, à quelques pas finalement de la «tour» du Centre Mahaut-d’Artois qui abritait depuis 1974 plus de trente kilomètres linéaires de documents.
Le « grand » déménagement a débuté le 1er septembre 2025, il va durer plusieurs mois. Au printemps 2026, le nouveau bâtiment regroupera sur un seul site l’ensemble des fonds et des activités des Archives départementales. Petit retour sur l’histoire des Archives départementales du Pas-de-Calais
Jusqu’à aujourd’hui, le service des Archives départementales occupait deux sites distincts : archives contemporaines et journaux au Centre Georges-Besnier, place de la Préfecture à Arras ; archives anciennes et modernes au Centre Mahaut-d’Artois à Dainville. Arrivés à saturation, ces sites ne répondaient plus aux normes actuelles de conservation des archives ni aux normes actuelles d’accessibilité à tous. En 2019, le conseil départemental du Pas-de-Calais, compétent en matière d’archives depuis les lois de décentralisation de 1983, a décidé de construire un nouveau centre de stockage. La « Grande Construction » a débuté en 2022 pour s’achever à la fin de l’été 2025.
L’incendie de 1915
La Révolution française est à l’origine de la création des archives départementales, une loi de 1 796 instituant un service dans chaque chef-lieu, pour collecter et classer.
En 1897, les archives départementales comptaient 5700 mètres de rayonnages et en 1913, Eugène Déprez parlait déjà de « saturation ». En juillet 1914, une installation des archives fut envisagée dans une partie du grand séminaire… Un mois plus tard la guerre était déclarée. Le 31 janvier 1915, le palais Saint-Vaast fut touché par les bombardements, Alexis Lavoine organisa la mise en lieu sûr des archives les plus précieuses (dans une cave sous la chapelle), mais les combats aux portes d’Arras empêchèrent une évacuation totale des archives.
La catastrophe survint le 5 juillet 1915. Le palais, une nouvelle fois bombardé, fut la proie des flammes et ce qui pouvait être sauvé fut réparti dans différents dépôts, à Paris, Toulouse, Boulogne-sur-Mer, Montreuil-sur-Mer.
« L’ère Bougard »
En 1919, Georges Besnier (1879-1961) eut pour mission de rapatrier les archives éparpillées et de construire un nouveau dépôt, moderne, place de la Préfecture à Arras. Cet archiviste a laissé « une empreinte indélébile » dans l’histoire des archives du Pas-de-Calais, mais aussi dans celle du Pas-de-Calais - il a été le secrétaire général de la mairie d’Arras, une figure de la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale, un adjoint au maire d’Arras. Les archives du Pas-de-Calais sortirent « indemnes » de la guerre et entrèrent dans « l’ère Bougard », Pierre Bougard (1923- 2014) faisant toute sa carrière à Arras, directeur de 1949 à 1987. Il mit rapidement à l’ordre du jour l’encombrement du dépôt, la nécessité d’une extension, la création d’un service éducatif. Son vœu de grandissement fut exaucé le 16 décembre 1968 quand le conseil général adopta l’avant-projet d’un nouveau bâtiment dessiné par l’architecte en chef du département, Francis Lemaire. Le chantier démarra le 20 août 1971 à Dainville et trois ans plus tard, le 23 septembre 1974, le centre des archives de Dainville ouvrait au public. Le dépôt de la place de la Préfecture à Arras fut conservé.
60000 mètres linéaires
Pierre Bougard créa dès 1950 l’un des premiers laboratoires de micro filmage de France. Un service éducatif vit le jour à la rentrée 1976 sous la houlette d’Alain Nolibos. Les salles de lecture connurent une forte hausse de fréquentation, liée notamment à la « démocratisation » de la recherche généalogique. Pierre Bougard prit sa retraite le 31 juillet 1987, les archives départementales étaient passées le 1er janvier 1986 sous l’autorité du président du conseil général.
En 1997, le dépôt d’Arras prit le nom de Centre Georges-Besnier et celui de Dainville fut baptisé Centre Mahaut d’Artois - figure historique du Moyen Âge. Les continuateurs de Pierre Bougard - Catherine Dhérent, Patrice Marcilloux, Jean-Éric Iung, Lionel Gallois (depuis 2009) - ont mené une politique de valorisation des archives, en multipliant les expositions, en publiant de nombreux ouvrages.
La dématérialisation des archives lancée en 2005, puis la création d’un site Internet en 2008 ont permis d’entrer dans l’ère de l’informatisation avec mise en ligne de listes nominatives de population, de registres paroissiaux et d’état civil, de feuillets matricules militaires…
En 2026, le nouveau centre des Archives du Pas-de-Calais, bâtiment de 11000 mètres carrés implanté près de la direction de l’archéologie et de la médiathèque départementale, dans le cadre d’un pôle culturel départemental, pourra accueillir les besoins de stockage actuels et ceux prévus pour les trente prochaines années, soit environ 60 kilomètres linéaires d’archives !
Un article à retrouver en intégralité en page 18 du journal L'Echo62 d'octobre 2025
Photos Jérôme Pouille/CD62